Le plan B… du
Peuple !
Oui, il y’avait un plan B… celui du
peuple sénégalais ! Face
à la forfaiture de Wade et de son conseil constitutionnel aux ordres, les
sénégalais avaient le choix entre l’insurrection (armée?) et la démocratie. Ils
ont choisi la démocratie, au grand dam de tous les Cassandre qui prédisaient
l’apocalypse pour ce 26 février. L’alternative du chaos que tout le monde
prédisait n’eut donc pas lieu. C’est au contraire un peuple civilisé qui est
allé voter ce dimanche dans le calme et la bonne humeur, et qui a montré qu’en
définitive seule sa volonté
compte. Pourtant, à écouter certains de nos doctes analystes politiques, on
avait l’impression que le destin du Sénégal était suspendu aux combinaisons que
le Président de la république allait concocter dans le secret de son palais,
comme si le peuple, lui, n’avait
pas son mot à dire. D’autres, plus téméraires, affirmaient le plus calmement du
monde que le pays ne pouvait pas faire l’économie d’un bain de sang pour se
sortir de cette crise. Etonnant peuple sénégalais qui a compris que les
problèmes qui surgissent en démocratie doivent trouver leur solution par… la
démocratie ! Deux remarques doivent être faites d’ors et déjà à ce
sujet :
1 – Les sénégalais ont compris, et cela
au moins depuis un certain 19 mars 2000, qu’ils peuvent sanctionner les hommes
politiques par la voix des urnes. S’ils sont sortis massivement le 23 juin
dernier manifester contre le fameux projet de loi de Wade instituant le
dauphinat, c’était justement pour protéger cet acquis démocratique. C’est ce
qui explique sans doute que « les candidats de la Place de
l’indépendance » aient été lourdement sanctionnés, alors que d’après
des sondages non officiels, au moins d’eux d’entre eux, en l’occurrence Cheikh
Bamba Dièye et Ibrahima Fall bénéficiaient d’un fort capital de sympathie
auprès de l’électorat, et auraient sans doute fait un meilleur score s’ils
n’avaient pas adopté cette stratégie pour le moins suicidaire. Que Macky Sall
soit le vainqueur de ce premier tour n’est donc pas en soi une surprise
puisqu’il a compris dés le départ que la bataille contre la candidature de Wade
était perdue, et que l’imbroglio juridico-politique que cette donne allait
créer ne pouvait être résolu que par la voix des urnes. Ce n’est donc peut-être
pas tant sur son programme qu’il a été élu – on n’a pratiquement pas parlé de programme
au cours de cette campagne – que sur cette stratégie intelligente qui nous a
évité le pire. Il faut donc comprendre par là que la construction d’une
démocratie véritable est une œuvre de longue haleine et ne peut se faire que
dans le cadre des lois républicaines. Certes, il y’aura toujours un écart entre
les principes tels qu’ils existent dans leur pureté et la réalité sociologique
du terrain qui ne peut évoluer que très lentement. L’impatience ‘’petite
bourgeoise’’ de nos élites politiques et intellectuelles ne traduit donc que
leur décalage par rapport au peuple au nom duquel ils prétendent pourtant
parler.
2 - Au regard de la façon dont le
scrutin s’est déroulé, il n’est plus permis de dire que des élections
transparentes sont impossibles au Sénégal. On a entendu des candidats dire que
Wade n’organiserait jamais des élections pour les perdre, et que cela ne
servirait à rien d’essayer de le battre par les urnes, comme si le PDS n’avait
pas largement perdu les élections locales de 2009 avec le même fichier. Je me
demande si ce type de discours démobilisateur n’a pas contribué à augmenter le
taux d’abstention assez important dans certaines régions du pays, ce qui,
manifestement, a fait le jeu du pouvoir. Notre opposition nous a tellement
habitués à l’idée que Wade n’est jamais à court d’idées lorsqu’il s’agit
tromper son monde qu’ils ont fini, sans le vouloir, par créer le mythe du
« Wade sorcier » qui peut toujours se sortir des pires situations,
alors que la plupart du temps c’est leur manque d’imagination et leur
inconséquence qui sont en cause. Certes, il y’a des choses à améliorer parce
qu’aucun système électoral n’est jamais parfait, mais globalement on peut dire
qu’en cette matière nous avons fait d’énormes progrès qu’il faudrait, bien
entendu, consolider.